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Mot de notre parrain, Tanguy Queffélec

C’est un cadeau ?

Je n’hésite pas à l’affirmer : mon infarctus d’il y a cinq ans fut un cadeau pour moi, et pas si loin d’avoir été le plus précieux que j’ai jamais reçu… Point de vue franchement audacieux, je vous l’accorde, mais nullement déraisonnable. Maintenant, pour l’avoir vécu, affronté dans mon organisme de sexagénaire, je sais tout ce que cet événement recouvre de périlleux sur le plan médical, événement assorti le plus souvent d’épisodes chirurgicaux. Personne ne songerait à le contester : l’infarctus, l’accident cardiaque en général constitue une épreuve d’ampleur, un choc qui ébranle l’esprit autant que le corps. Il appartiendrait ici à des cardiologues d’en évoquer les contours et les conséquences…

Photo Tanguy Queffélec

Cela étant, mon infarctus resterait un cadeau ? Oui… Donc : que m’a-t-il apporté, sur le long terme, pas juste au lendemain de l’événement lui-même ? Les mois qui suivirent la phase de convalescence, j’ai peu à peu accédé à une idée bien plus complète, bien plus précise de ce qui me constitue, au plan de mon organisme bien sûr, regroupé autour des trois cents grammes de mon organe cardiaque, mais aussi au plan de mon intériorité mentale, gouvernée par ce qu’on nomme une psychologie, aux mouvements, aux états propres à chacun – « Deviens ce que tu es », proclamait un poète de l’Antiquité : l’infarctus ne serait-il pas un moyen d’y parvenir ?

Avec mon arrêt cardiaque, après avoir vécu des décennies dans l’illusion de jouir d’une « santé de fer », j’ai découvert d’un coup l’extrême précarité de ma présence sur la terre, puisque j’étais capable de défaillances physiques brutales, pouvant conduire au pire sans interventions médicales immédiates. Comme un contrepoids à cette prise de conscience, au cours de ma convalescence, je percevrais aussi en moi-même un potentiel de résistance autant que de récupération étonnant, dont je ne m’imaginais pas détenteur, et qui était de l’ordre du miracle. Merci qui ? Un Dieu quelconque ? Les progrès de la médecine ?…

Cinq ans après, inspiré par mon expérience de l’arrêt cardiaque, je porte toujours ce sentiment, devenu plutôt une conviction : en quelque sorte, nous êtres humains serions dotés d’une structure corporelle de verre et d’acier, une association de deux composantes, deux facultés apparemment incompatibles, celle de l’effondrement et celle de la résurrection… Cette chose-là me semble une évidence aujourd’hui, un prolongement des plus logique : cette dualité se retrouverait en nous au niveau mental. Avec des variantes, nous serions à la fois accessibles à des phases de désarroi, voire de dépression, mais aussi de redressement soudain, pas moins vigoureux qu’une deuxième naissance.

J’ai envie d’être franc avec vous : depuis mon infarctus en fait, je ne me suis jamais senti aussi fragile, aussi émotif peut-être, et en même temps aussi consistant, aussi stable psychologiquement. Vous madame, vous monsieur qui avez vécu directement l’accident cardiaque, ou à travers un proche, soyez francs à votre tour : ne percevez-vous pas en vous-mêmes cette contradiction ? Mais l’accepter, l’assimiler définitivement ne nous rendrait-il pas plus à même de relever les défis universels qui nous sont proposés au cours de l’existence, et ce serait grâce à un dysfonctionnement un jour au creux de notre petit cœur… Quel beau cadeau ?

Qu’en pensez-vous ? Parlons-en à l’occasion (je n’ose pas dire : à cœur ouvert). Si vous passez nous voir, arrivez avec d’autres cadeaux que celui que je viens d’évoquer.

Baisers fraternels,